Terre, une invitation au voyage

Exploration du Panduranga, le royaume disparu

Hugo Blondel
Exploration du Panduranga, le royaume disparu

Connu pour ses rizières en terrasses et sa baie d’Halong, le Vietnam recèle bien d’autres lieux encore méconnus à explorer. Denis Chambon, concepteur de voyages Terres d'Aventure et spécialiste de la zone, s’est rendu dans l’ancien royaume du Panduranga, terre du peuple Cham.

Ce n'est pas la première fois que tu pars au Vietnam. Cette fois tu as exploré la région du Panduranga, ancien royaume du peuple Cham, situé au sud du pays. Pourquoi es-tu parti explorer cette zone ?

C'est la quatrième fois que je pars au Vietnam. Le Panduranga est une région historique mais elle ne correspond pas à une région administrative. C'était l'un des quatre royaumes du peuple Cham. On appelait ça le Champa. Historiquement, le Vietnam s'est constitué sur une très longue durée. L'ethnie majoritaire, les Viet, sont originaires du delta du fleuve rouge, dans le nord du pays. Ils ont colonisé le sud et le dernier royaume à leur avoir résisté n'est autre que le Panduranga. L'intérêt historique est important mais la zone possède aussi de nombreux points d'intérêts naturels.

Justement, décris-nous les environnements traversés et les balades possibles ?

Sur notre voyage Sentiers mystérieux du Tonkin et du Panduranga, on propose un trek de 3 jours dans la forêt avec des nuits dans un campement aménagé pour accueillir des hamacs, en pleine immersion. Il y a des piscines naturelles à proximité. Pendant ce trek, on monte notamment au sommet du mont Faux-Varella en traversant tous les étages de végétation. De là-haut on profite de très beaux panoramas sur toute la forêt et la mer au loin. Le long de la côte, on trouve aussi des chaos de rochers granitiques gigantesques qui permettent de faire des randonnées en balcon au-dessus d'une mer turquoise. C'est magnifique !

Vue panoramique depuis le mont Faux-Varella ©Denis Chambon

Sur la côte, on trouve le massif sauvage du Nui Chua. A quoi ressemble-t-il ?

Le Nui Chua est un paysage assez inattendu. Le sommet culmine à environ 1 400 mètres. C'est une zone composée d'un enchaînement de petits massifs côtiers, proches de la mer, certains se déversent même dans la mer. La majeure partie est recouverte de forêts épaisses avec des espaces cultivés par l'ethnie Raglai. Les massifs sont traversés par des rivières dont les lits sont faits d'énormes rochers de granit. Le terrain peut être technique.

Plus étonnant, on trouve aussi des dunes dans la région de Mui Ne ?

Là c'est surprise totale ! Il s'agit d'un grand massif dunaire avec une végétation maritime basse. Dans un petit périmètre, on trouve des dunes blanches et d'autres ocres. L'erg est situé au-dessus d'une forêt. Cela complète très bien un voyage dans le Nord.

Côte près de la baie de Vinh Hy, à proximité du parc de Nui Chua ©Denis Chambon

Tu as également visité plusieurs temples, dont celui de Po Klong Garai à Thap Cham. Quelles sont leurs spécificités ?

Les temples ont avant tout une importance religieuse liée au culte brahmanique. La pratique religieuse des Chams est similaire à celle qu'on retrouve à Angkor, au cœur de l'ancien royaume khmer. Leur architecture est proche également. Ce sont des grandes tours en brique de terre avec des reliefs sculptés. À l'intérieur, on trouve des petits sanctuaires avec des sculptures de vaches sacrées où sont effectuées les prières, où on brûle de l'encens. Cela fait penser aux temples à Roluos, proche du lac Tonlé Sap au Cambodge. Les temples sont anciens mais ne sont pas en ruines, on y pratique encore des cérémonies et des fêtes. C'est très différent du reste du Vietnam.

Qui sont les Chams ?

Les Chams sont originaires d'Inde et pratiquaient une religion brahmanique, une branche de l'hindouisme. C'est un peuple de commerçants et de navigateurs qui s'est d'abord déplacé à Sumatra et en Malaisie, avant de s'établir sur la côte vietnamienne il y a plus de 1000 ans. À partir du XVIe siècle, la moitié de la population s'est progressivement convertie à l'Islam. Aujourd'hui, on les retrouve essentiellement au Cambodge et au Vietnam. Un voyage au Panduranga permet de rencontrer des défenseurs de la culture et des traditions chams. C'est une culture encore vivante.

Temple de Po Klong Garai ©Saiko3p / Getty Images

Les rencontres forment le cœur d'un voyage au Vietnam. On échange facilement avec les locaux quelques paroles et des sourires. Peux-tu partager une anecdote ?

Pendant le trek, notre guide de l'ethnie Raglai nous a raconté l'existence de personnages mythiques dans "la forêt des monstres". Il s'agirait de primates humanoïdes avec des grandes griffes, comme des yétis de la forêt vietnamienne. Les pisteurs qui nous accompagnaient ont aussi évoqué des petits lutins inoffensifs avec des pieds à trois doigts qui vivent le long des petits cours d'eau. Qu'on y croit ou pas, je trouve que cela révèle leur vision du monde, leur rapport à la nature. C'est fascinant.

À qui s'adresse un voyage dans le Panduranga ?

À quelqu'un qui est déjà allé au Vietnam. Le nord du pays est emblématique, avec toutes ses ethnies, ses villages, ses montagnes et ses rizières splendides. Dans notre voyage Sur les sentiers mystérieux du Tonkin, on offre la chance d'aller dans des régions très reculées, au plus près de l'âme du pays. Le sud permet de compléter cet aperçu avec des paysages plus inattendus et la rencontre avec un peuple accueillants, aux traditions vivaces. C'est une façon de sortir aussi des sentiers battus.

Campement au milieu de la forêt avec les pisteurs Raglai ©Denis Chambon

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